+ story of my life
I'll be here to hold your hand cause you're my king and I'm your lionheart.King and Lionheart - Of Monsters and Men─ Enfant, Wyatt était étrangement calme et timide. Il ne parlait pas beaucoup, sans doute par peur du regard des autres, ou tout simplement parce qu’il ne savait pas quoi dire. En classe, il était celui au fond qui baissait la tête lorsque l’enseignant cherchait à interroger quelqu’un. Même lorsqu’il connaissait la réponse à la question, il ne levait jamais la main pour parler. Il détestait parler en public, que les autres le regardent. Pourquoi ? Peut-être parce qu’il savait pertinemment l’allure misérable qu’il avait, avec ses pantalons toujours troués d’usure, ses pulls faits par sa grand-mère parfois trop petits et d’une qualité bien médiocre, avec ses chaussures achetées au rabais, tout indiquait son niveau de vie. Son père ne trouvait pas de travail, et sa mère galérait à nourrir toute la famille. Ca avait toujours été ainsi aussi loin que Wyatt se souvienne. Son frère, Alexis, avait neuf ans de plus que lui, de quoi creuser un sacré écart. En vérité, la naissance de Wyatt avait été un accident, et il avait dû faire avec. Autant dire que le plus jeune n’était pas le plus apprécié. Alexis et lui ne s’étaient jamais réellement bien entendu et pour ce qui était de ses parents, ils s’arrangeaient toujours pour l’avoir le moins possible dans les pattes. Pourtant ses parents, il les aimait profondément. Son père n’était pas aussi froid et distant que sa mère, cependant, il laissait tout faire. Lorsqu’il était seul avec son plus jeune fils, Bart ne le rejetait pas, au contraire, il était même plutôt proche de lui. Ce fut grâce à son père que Wyatt prit goût à la cuisine. Son père, il avait des tas de livres de recettes, soit volés, soit trouvés, soit achetés lorsque les économies l’avaient permis. Il adorait faire à manger pour sa famille, même si les moyens manquaient terriblement. Bart était gentil, bien trop d’ailleurs, et même quand il voulait garder son fils auprès de lui, il laissait sa femme l’emmener chez des amis, chez la grand-mère ou n’importe qui d’autre qui puisse le garder pour le tenir éloigner. Ce fut de cette façon qu’il se retrouva à neuf ans sur le lieu de travail de son oncle. Il était jardinier chez des riches. Autant dire, le monde opposé à celui de Wyatt. Il avait l’air d’un pouilleux au milieu des pièces d’or. C’était un somptueux manoir qu’il aimait contempler des heures durant, l’envie d’entrer lui brûlant l’estomac. Un lieu bien proche, et pourtant tellement lointain. Son oncle habitait juste à côté, pour plus de simplicité, dans un chalet qui ressemblait plus à une cabane qu’à autre chose. Wyatt passait ses journées dehors, à lire les livres de recettes de son père, à les apprendre par cœur, se demandant le goût que ça pouvait bien avoir. Puis un jour, il aperçut une petite fille, plus jeune que lui, une véritable princesse. C’était la fille qui habitait dans ce manoir. Elle était sublime, elle avait quelque chose de particulier mais bien sûr, à neuf ans, on n’appelle pas ça de l’amour, et puis, à neuf ans, trois ans de moins, c’était un faussé immense. Il l’observait de loin, plus admiratif de son statut qu’autre chose, puis un jour, ce fut elle qui vint l’accoster, un ballon à la main.
« Tu joues pas ? » Wyatt fit non de la tête, surpris, et intimidé, par l’intervention de la petite.
« Pourquoi ? » Wyatt ne savait pas quoi répondre. Il n’aimait pas parler, il était timide, il avait déjà conscience de leur différence évidente : Il était plus pauvre que pauvre, elle était plus riche que riche. Il haussa les épaules bêtement, et elle lui prit la main en rigolant.
« Viens jouer avec moi ! » Elle l’embarquait sans tenir compte de son allure et ils passèrent l’après-midi à jouer au ballon en rigolant naïvement. Petit à petit, ce jeu devint une habitude, ils s’amusaient ensemble et ils adoraient ça. Lily, un superbe prénom pour une superbe fille. Elle devint son amie, sa camarade de jeux malgré leurs différences d’âge et de milieu, sans se douter de l’importance que cette rencontre pouvait avoir.
I'm the hero of the story, don't need to be saved, it's alright, it's alrightHero - Regina Spektor─ Les années avaient passées, six ans exactement. Wyatt avait quinze ans lorsque sa vie changea du tout au tout. Son frère avait quitté le domicile familial depuis cinq ans, s’installant avec sa petite-amie du lycée. Il comptait même l’épouser, c’était pour dire à quel point il était amoureux d’elle. Depuis son départ, plus rien n’était pareil à la maison. Les parents de Wyatt ne s’entendaient plus, passant leur vie à se déchirer pour des raisons bien ridicules, si bien que Wyatt finit par croire que le mariage était ce qui pouvait tout détruire dans un couple. A présent, sa mère l’ignorait totalement, et dès qu’il parlait, elle ne répondait pas. Elle le détestait, ça se voyait. Il n’avait jamais réellement compris pourquoi. Qu’est-ce que son frère pouvait bien avoir de plus que lui ? Certes, Wyatt n’était pas le plus confiant, il n’était pas excentrique, ni même très vif, mais il se soignait. Lily, c’était son médicament. Avec elle, il riait pendant des heures, il parlait de tout et de rien, il s’exprimait comme jamais il ne l’avait fait. Lily, c’était sa meilleure amie. Le mariage de ses parents prit fin à ses quinze ans. Une simple signature qui changea sa vision de l’engagement à tout jamais. Dès lors, il rejeta l’idée même du mariage. A l’annonce de cette nouvelle choque, il alla chez Lily pour lui parler. C’était la seule qu’il avait envie de voir, la seule à qui il avait envie de tout raconter. Il savait que les parents de la jeune fille ne l’aimaient pas, mais peu importait. Il contourna la grande maison pour être en face de la chambre de Lily, et jeta des cailloux à sa fenêtre, en larmes après la terrible nouvelle. Le divorce de ses parents sonnait comme une mort pour lui. Il sentait tous ses espoirs se briser en mille morceaux. Désormais, jamais il n’obtiendrait l’attention de sa mère. Lily ouvrit finalement la fenêtre et descendit finalement le rejoindre. Elle n’avait que douze ans. Et pourtant, elle était déjà un soutien incroyable pour lui.
« Qu’est-ce qui t’arrive ? » Lorsqu’elle fut arrivée près de lui, il la prit directement dans ses bras, s’accrochant à la seule personne encore capable de le faire sourire.
« Mes parents vont divorcer. J’ai pas envie, c’est fini. Ma mère me regardera jamais ! Je suis rien, et les gens en ont plus rien à foutre de moi ! J’ai juste envie d’exister ! Pourquoi je peux rien faire ? Pourquoi elle veut pas de moi ? C’est des conneries le mariage ! C’est nul ! Ca brise les cœurs et ça se déchire ! Je veux pas qu’ils divorcent. » Il pleurait comme un bébé dans les bras de sa meilleure amie, il s’effondrait, lui le pauvre, et elle l’écoutait, elle l’aristocrate.
« Moi je m’en fiche pas ! T’as rien fait de mal, ta mère est juste trop conne pour se rendre compte de la superbe personne que tu es c’est tout. » Des mots simples, peut-être un peu clichés, mais rien que ça, ça le rassurait. Elle était là, elle. Lily était là, elle ne l’avait jamais regardé comme un moins que rien, elle s’en foutait elle, et c’était tout ce qui semblait compter. Peut-être que déjà, l’amour était présent, mais il ne s’en rendait pas encore compte. Trois ans, ça semble être tellement insurmontable quand on a quinze ans. Ils passèrent deux heures l’un avec l’autre ce soir-là, dans le jardin de la blonde, elle à le consoler de sa perte, et lui tentant de se calmer tant bien que mal. Cette annonce avait été un véritable choc pour lui, si bien que la même année, il redoublait sa dernière année au collège. Il s’installa avec son père, qui avait finalement réussi à trouver un travail, certes peu gratifiant, mais suffisamment bien payé pour vivre à peu près convenablement. Wyatt ne revit jamais plus sa mère, il avait raison, elle ne le regardait plus du tout, elle s’en foutait. Quant à son frère, il se mariait un an plus tard. Rien que pour ça, Wyatt se mit à le haïr. Il n’eût plus jamais confiance en l’engagement, il finit même par en avoir peur.
─ Au lycée, il n’était certainement pas le meilleur. L’élève tout juste moyen, voire mauvais, c’était lui. Il ne comprenait pas la vraie logique des mathématiques, à part pour créer de bons plats. Il ne parlait pas trois langues, ne passait pas son temps à lire et n’aimait pas tant que ça l’histoire, trouvant ce domaine fortement trop subjectif à son goût. A la maison, il pouvait passer des heures à cuisiner, parfois pour rien, juste pour le plaisir de suivre une recette, de s’améliorer toujours plus, il en oubliait même de faire ses devoirs. Et le pire, c’était quand Lily passait chez lui. Quand elle était là, il faisait tout pour l’épater, préparant des plats plus inventifs les uns des autres. Il faisait tellement d’efforts quand elle était là, c’en était incroyable. Son père avait directement remarqué qu’il était fou amoureux d’elle, et s’amusait bien de la situation, mais Wyatt, lui, n’avait pas encore réalisé. Elle était la personne la plus importante à ses yeux, c’était une évidence, mais il n’avait jamais pensé à l’amour. Pourtant il aurait dû le voir venir de très loin, vu le rythme des battements de son cœur quand elle était avec lui, ou sa rage lorsqu’un autre garçon l’approchait. Il aurait dû le savoir depuis bien longtemps, mais ça lui paraissait impossible, étant donné leurs milieux différents. Il réalisa tout son amour pour elle lorsqu’elle le rejoignit au lycée. Bien sûr, ils n’étaient pas dans la même classe, mais chaque fois que la sonnerie retentissait, annonçant la pause, ils se rejoignaient et profitait des quelques minutes qu’ils pouvaient avoir ensemble. Rien que tous les deux. Lui, il pouvait abandonner tous ses amis juste pour aller déjeuner avec elle, ou pour lui tenir compagnie.
« Avoue, t’es amoureux d’elle ! » Un ami lui avait lancé cette remarque un jour, alors qu’il souriait bêtement en disant au revoir à Lily, de loin, d’un signe de la main. Wyatt se retourna soudain vers son ami, surpris.
« Quoi ? Non, bien sûr que non, tu m’as vu ? Et tu l’as vue, elle ? C’est pas possible. » Son ami se mit bêtement à rire.
« Arrête, ça se voit comme le nez au milieu d’la figure. Tu passes tout ton temps avec elle et quand elle est pas là tu tires la gueule. Tu rougis quand elle te sourit et t’as l’air con des fois quand tu lui parles, et le pire, c’est quand elle est avec un autre type ! Faut voir le regard que tu lances ! Arrête de mentir ! Et c’est pas parce qu’elle est riche que t’as pas le droit. » Wyatt sourit en secouant la tête à la négative. Pour lui, ce n’était pas possible.
« Pff, n’importe quoi. Lily, c’est ma meilleure amie, c’est comme une sœur pour moi. » Son ami se moquait bien de lui.
« Ouais, ben attention à l’inceste alors ! » Wyatt lui donna une petite tape amicale en le traitant d’idiot, puis ils rentrèrent chacun de leur côté chez eux. Il pensa à cette discussion toute la soirée, si bien qu’il demanda même conseil à son père.
« Papa, c’est vrai que j’ai l’air bête quand je parle à Delilah ? Et que je fais la tête quand elle est pas là ? » Il posait la question le plus honnêtement du monde, cherchant à savoir ce qu’il ressentait vraiment. Son père sourit doucement, puis lui ébouriffa les cheveux.
« C’est vrai que tu souris bien plus quand elle est là, hein ! Allez va, j’ai bien compris que tu l’aimais bien cette petite ! » Même son père s’y mettait. Tout le monde semblait l’avoir remarqué avant lui. Il passa la nuit à analyser son comportement lorsqu’il était avec elle. Le lendemain matin, en la voyant, il prit enfin conscience qu’il était effectivement dingue d’elle, ce qui allait bien compliquer les choses à présent. Il se tût, ne préférant rien dire à ce sujet pour ne pas risquer de briser leur amitié en compliquant tout. Et puis, il n’était rien lui, à côté de cette princesse. Il n’avait pas vraiment le droit d’éprouver ce genre de sentiments à son égard.
No I can stop loving, no I won't stop loving you ! Why should I ? Can't stop loving you - Phil Collins─ Ca faisait environ quatre ans qu’il s’était rendu compte des sentiments qu’il éprouvait pour Delilah. Le lycée, c’était du passé. Il avait redoublé sa dernière année, n’étant décidément pas fait pour les études générales. Lui, ce qu’il voulait, c’était devenir un grand cuisinier. Après le lycée, il s’était arrangé pour suivre cette voie, coûte que coûte, et Lily l’encourageait toujours plus. Il l’aimait d’une telle force que ça le détruisait presque. Il se taisait, tentant toujours de réprimer ses sentiments, conscient qu’une relation avec elle ne serait certainement pas possible. Il n’était pas fait pour elle, il n’était rien, et les parents de la jeune femme ne l’appréciaient guère. Il n’y avait plus qu’à essayer tant bien que mal d’oublier, mais finalement, quoi qu’il fasse, il revenait toujours à elle. Un soir, il l’invita chez lui, préparant le repas, comme il avait l’habitude de faire. Il aimait avoir son avis à elle, plus que celui de quiconque. Il ne vivait plus chez son père depuis un moment, ayant à présent vingt-deux ans, et un objectif sérieux, il s’était trouvé un petit studio tranquille. Ce n’était certainement pas le grand luxe, au contraire, mais il ne s’y sentait pas si mal. Ce soir-là changea toute sa vie. Elle mangeait tranquillement son plat devant le regard impatient de Wyatt. Elle était tellement magnifique, ça lui coupait le souffle chaque fois qu’il la voyait. Elle avait dix-neuf ans, ils avaient bien grandi depuis qu’ils se connaissaient, mais il n’avait jamais cessé de l’admirer. Elle était sa meilleure amie, et malgré tout, certainement l’amour de sa vie.
« Alors, qu’est-ce que tu en penses ? » Il crevait d’impatience de savoir si son plat était réussi ou non, devant le présenter le lendemain à un jury. Elle prit tout son temps pour répondre, comme pour le faire languir un peu plus, s’essuyait la bouche comme l’aristocrate qu’elle était. Elle jouait bien avec ce côté-là, et ça lui plaisait.
« J’en pense… que c’est sans doute l’un des meilleurs plats que j’ai mangé. » Evidemment à cette remarque, il ne put que sourire un peu plus. Lily était toujours la première à qui il faisait goûter ses plats, puisque pour lui, il n’y avait que son avis qui comptait.
« Arrête t’exagères, dans ton monde tu dois avoir cent fois mieux. » Elle fit mine de bouder et il sourit plus encore. Puis elle reprit son sérieux.
« Peut-être, mais c’est mieux quand c’est toi qui cuisines. » Son cœur rata un battement. Elle n’avait même pas idée de ce que cette simple phrase signifiait pour lui. Il n’en pouvait plus, il fallait qu’il parle. Rester comme ça, de simples amis, alors qu’il aurait voulu tellement plus, c’était insupportable. Il s’assit en face d’elle et tapota nerveusement la table. Il avait peur de sa réaction, et de celle de tous les autres.
« Ca fait des années qu’on se connaît hein ? » Elle hocha la tête. Ca faisait treize ans maintenant. Il déglutit, puis continua sur sa lancée.
« Tu dois savoir à peu près tout de moi, et je pense en savoir beaucoup sur toi, pas vrai ? » Elle fronça les sourcils, mais acquiesça. Elle devait trouver ça louche. Il ne savait pas comment lui dire ça sans passer pour un idiot.
« Euh… Je sais pas comment te dire ça… J’ai rien moi, je suis rien, toi, t’es une vraie princesse, et puis, tu es merveilleuse… » Il la contempla un instant comme pour confirmer ce qu’il disait. Oui, elle était merveilleuse.
« Voilà… Ça fait des années maintenant que je te regarde différemment. Pas comme une amie, tu vois ? » Il prit une profonde inspiration pour lâcher la bombe.
« Je suis amoureux de toi. C’est con pas vrai ? Comme si je pouvais être assez bien pour toi ! » Il se mit à rire amèrement. Voilà, tout était dit. Il s’apprêtait presque à disparaître de sa vie, sans se douter que pour réponse, il aurait le droit à un baiser de sa part. Ce fut le début de leur relation.
And you can tell everybody this is your song, it may be quite simple but now that it's doneYour Song - Elton JohnTrois ans étaient passés depuis cette déclaration spontanée. Trois ans qu’elle partageait sa vie en secret. Ils n’avaient rien dit à personne. Ce n’était pas vraiment l’envie qui manquait, mais pour Wyatt, tout dire, ce serait risquer de tout perdre. Ca serait se mettre définitivement la famille de la blonde à dos, ou bien accepter de se livrer à toutes ces stupidités d’aristocrates dont il ne comprenait pas grand-chose. Il aimait passionnément Lily, ah ça oui, il l’aimait plus que tout, mais sa peur de l’engagement l’empêchait de le prouver aux yeux du monde. Elle venait chez lui en secret, prétextant aller chez des amis, ou autre. Wyatt se déplaçait rarement chez elle, de peur que ses parents les surprennent. Il ne voulait pas que ça arrive. Il n’était pas assez bien pour elle, c’était certain, elle avait tout, il n’avait rien, mais il lui était impossible de rompre, il l’aimait trop. Il savait que depuis quelques temps, elle en avait assez de cette situation, il en était totalement conscient, mais dans sa lâcheté, il refusait d’aborder le sujet. Il ne voulait pas renoncer à ce qu’il avait réussi à avoir, un poste en cuisine. Certes, ce n’était qu’un poste de commis, mais c’était toujours un pas de plus vers son rêve. Il y avait tellement d’enjeux dans cette relation. Certes, ne pas pouvoir se balader tranquillement en ville main dans la main, ça lui manquait, mais il était persuadé que c’était mieux pour tout le monde. Ca allait un jour se retourner contre lui, il le savait, et chaque fois qu’il la voyait entourée de bon monde, il rageait intérieurement, sans rien pouvoir faire, sans compter les disputes quotidiennes à ce sujet, mais il ne voulait pas que sa relation avec elle devienne celle de ses parents. Il était lâche, il fallait bien l’avouer.
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